Le marché du naissain d’huître est paralysé
Temps gris sur la plus grande marée du printemps. Wilfried Joneau remonte la passerelle d’accès au quai du Chapus, glacière à la main, moral à fond de cale. Ce week-end encore, pour la troisième semaine consécutive, le jeune producteur de Bourcefranc n’ira ni dans la Vienne, ni en Touraine, à la rencontre de ses clients sur le marché.
Quand bien même les résultats sur la concentration en toxine ASP du milieu seraient favorables aujourd’hui (lire par ailleurs), la réouverture n’interviendrait pas avant une seconde analyse positive, une semaine plus tard.
Comme beaucoup, Wilfried Joneau a succédé à son père.
Après un parcours en tandem au sein d’un groupement agricole familial (Gaec), il a créé sa propre société.
Maigre consolation, l’interdiction d’expédier ne barre pas le chemin des parcs.
Même si les arrêtés du préfet réduisent la marge d’action des exploitants.
En particulier celle des naisseurs, spécialistes du captage d’huîtres, dont l’activité se concentre dans l’embouchure de la Charente.
À Port-des-Barques, Michel Grasset dirige l’une des plus grosses unités de captage naturel.
Les Bretons et les Normands ne peuvent pas récupérer ici le naissain qu’ils élèvent ou achètent.
Et les Charentais ne peuvent pas le déplacer sur leurs parcs d’élevage, au nord de la Loire.
Tout est bloqué par l’interdiction de transférer les huîtres, alors que nous sommes dans un contexte de manque d’huîtres, et qu’il est bon d’avoir garni ses parcs au printemps, période de bonne croissance des huîtres.
L’État interdit ces transferts en se basant sur un avis de l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer).
Michel Grasset reçoit chaque jour une demi-douzaine d’appels de collègues extérieurs à la Charente-Maritime en attente de naissain.
Du fait des mortalités, il nous reste 20 à 30 % d’huîtres de taille marchande. Source